Je découvre par hasard un blog d'un enseignant de philosophie en Terminale, Nicomaque (avec une partie "publicitaire") qui devrait dissiper les malentendus de gauchisme ou même neutralité de cet enseignement, puisqu'il ne dissimule pas un certain unilatéralisme hayekien.
Il tient à écarter ce qu'il considère comme une désinformation anti-américaine sur le système de santé et le projet de réforme Obama, en se fondant sur Guy Sorman, ainsi que le Weekly Standard :
* Ceux qui s'assurent directement (10%) :
S'ils ne bénéficient pas d'assurance d'entreprise, les Américains peuvent s'assurer individuellement auprès d'organismes privés relativement chers.
* Ceux qui ne sont pas du tout couverts (16%) :
Parce qu'ils ne sont pas assez pauvres pour être couverts par Medicaid et parce qu'ils ne souhaitent pas s'offrir une assurance individuelle. Il faut en effet rappeler que :
1° l'assurance maladie n'est pas obligatoire
2° ces non-assurés ne souhaitent pas s'assurer car ils ont d'autres projets d'investissement et qu'ils ne craignent pas particulièrement pour leur santé (65% ont moins de 35 ans).
Ajoutons qu'il existe aux USA des free clinics, sortes de centres de soins fonctionnant sur la base de la charité et du volontariat. Ces établissements fournissent donc soins et médicaments gratuits. Ces free clinics fonctionnent grâce aux dons privés. Les associations caritatives et humanitaires de ce type sont nombreuses et comptent des millions de bénévoles.
Ainsi, contrairement à toutes les idées reçues, l'Etat providence existe aussi aux USA (et pas seulement pour l'assurance maladie). Les pauvres et les personnes âgées sont bien prises en charge par l’Etat fédéral. Cette prise en charge recouvre aussi bien les soins dentaires, que les consultations ou les hospitalisations.
Mais la particularité américaine, c'est :
1° l' existence d'une liberté individuelle de choisir son assurance ou de ne pas s'assurer du tout.
2° le refus d'une organisation étatique de la charité qui est laissée à la libre initiative individuelle.
Ce sont ces deux particularités de la tradition individualiste américaine que les socialistes-collectivistes ne peuvent tolérer et qu'il feront tout pour abolir.
(c'est moi qui souligne)
Donc (1) Il reconnaît honnêtement que l'assurance individuelle si on n'est pas couvert par son entreprise ou Medicare/Medicaid est plus chère, mais (2) nous assure que les 16% de non-assurés (45 700 000 personnes) n'ont tous fait que le libre choix d'investissement en restant non-assurés. Et de toute manière de quoi se plaignent-ils ? Il y a toujours de la Charité.
Le problème du système santé américain n'est pas que de dangereux idéologues "collectivistes" veulent ruiner la liberté individuelle, mais que même les personnes couvertes par des assurances privées se voient privées de soins pour des raisons purement budgétaires. Même les personnes couvertes se plaignent d'un système plus cher que le nôtre, qui profite de plus en plus à des lobbies de l'assurance, et aux effets nettement moins justes que ceux des autres pays industrialisés (même si sur certains domaines, comme le cancer, il y a en effet de bonnes statistiques). La question n'est donc pas la charité mais bien un principe minimal d'équité et d'utilité. Pourquoi les USA devraient-ils être condamnés à un système moins efficace et moins juste que les autres nations de la Terre ? Au nom de la pureté de principes hayekiens ?
La sécurité collective sur la santé, contrairement à certaines allocations, n'entraîne pas vraiment, même selon la critique libérale, de risque d'effets pervers dans les incentives : les personnes ne choisissent pas de tomber malades, ce n'est pas une assurance de "confort". L'idée de sécurité sociale (au sens français des assurances-maladies) est d'assurer à tous cette possibilité d'avoir accès aux mêmes soins sans que vos risques de survivre et de voir vos enfants survivre ou vivre moins mal ne dépende d'autres conditions comme votre emploi.
Je ne crois pas que le vrai Aristote, quel que soit sa critique des dérives égalitaristes, aurait conseillé à son fils Nicomaque qu'une Cité juste puisse se contenter de la charité arbitraire comme seule correctif aux injustices de la fortune.

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